Explorer le Kansai à travers sa gastronomie, c’est plonger au cœur culturel du Japon tout en parcourant les cuisines les plus emblématiques du pays. Cette région, qui englobe notamment Osaka, Kyoto, Kobe et Nara, est réputée pour la richesse de sa tradition culinaire et la diversité de ses saveurs. En tant qu’ancien chef formé au Japon et amoureux de la cuisine authentique, je vous propose un itinéraire d’une semaine taillé pour les passionnés de gastronomie japonaise. Préparez vos baguettes, c’est parti.
Jour 1 – Osaka : immersion dans le royaume du street food
Si Tokyo est la capitale administrative du Japon, Osaka est sans conteste sa capitale culinaire. Dès les premières heures, je vous recommande de débuter l’exploration dans le quartier de Dotonbori, célèbre pour ses néons et sa convivialité.
Trois spécialités sont incontournables :
- Takoyaki – Boulettes de pâte au poulpe grillées à la plancha. Leur histoire remonte aux années 1930, et elles sont devenues un emblème local.
- Okonomiyaki – Crêpe salée garnie au choix (porc, fruits de mer, légumes, fromage). Mon adresse favorite : Mizuno, une institution familiale avec plus de 70 ans d’expérience.
- Kushikatsu – Brochettes panées et frites, servies avec une sauce tonkatsu maison. Attention à ne pas tremper deux fois dans la sauce, c’est une règle sacrée !
Osaka résume bien le concept de kuidaore (食い倒れ), que l’on pourrait traduire par “se ruiner par la bouffe”. Une philosophie de vie, en somme.
Jour 2 – Kyoto : élégance et raffinement culinaire
De la trépidante Osaka, prenez le train jusqu’à Kyoto (30 minutes). Ici, place à la délicatesse. La ville est célèbre pour sa kaiseki ryōri, haute cuisine japonaise, souvent servie dans des auberges traditionnelles (ryōkan).
Un repas kaiseki se compose de plusieurs plats saisonniers aux présentations artistiques. Il peut inclure :
- Sakizuke (amuse-bouche)
- Hassun (dégustation de mets assortis, souvent symboliques de la saison)
- Mukōzuke (poisson cru type sashimi)
- Yakimono (plat grillé, typiquement un poisson de rivière comme l’ayū)
À Kyoto, ne manquez pas non plus le yudofu (tofu bouilli), spécialité du quartier d’Arashiyama, souvent dégustée dans les temples bouddhistes. Simple, zen, et nourrissant.
Suggestion d’adresse : Gion Karyo, établissement discret avec un service impeccable et des produits saisonniers d’une fraîcheur irréprochable.
Jour 3 – Nara : une pause végétale, au carrefour de la spiritualité
Nara, ancienne capitale impériale, se visite aisément depuis Kyoto ou Osaka. Au-delà des daims sacrés et des temples millénaires, cette ville propose une cuisine inspirée du bouddhisme zen : le shōjin ryōri.
Cette cuisine végétarienne, développée par les moines depuis plus de 700 ans, repose sur le principe des cinq couleurs (go shiki) et des cinq saveurs. Exemple de mets typiques :
- Koya-dōfu (tofu lyophilisé, tendre et spongieux)
- Nimono (légumes mijotés dans un bouillon au dashi végétal)
- Aemono (salade de légumes assaisonnés au sésame)
Essayez un repas dans un temple tel que Jikō-in, où gastronomie et méditation se rejoignent au creux d’un jardin de pierre.
Jour 4 – Kobe : boeuf légendaire et traditions bien gardées
Impossible de visiter le Kansai sans faire étape à Kobe. Connue mondialement pour son bœuf d’exception, la ville offre une expérience gustative unique. Le Wagyu de Kobe est élevé selon des critères stricts, garantissant une viande persillée, fondante, presque beurrée.
Mais attention : toutes les viandes « wagyu » ne sont pas du Kobe ! Pour mériter ce nom, la bête doit répondre à :
- Une généalogie précise, de race Tajima-gyu
- Des conditions d’élevage en Hyōgo
- Un label officiel et un grade de qualité A4 ou A5
Pour les puristes, optez pour une dégustation au comptoir, en teppanyaki (grill japonais), où le chef cuisine la viande devant vous. L’adresse que je recommande : Mouriya, vieille de plus de 130 ans.
Jour 5 – Osaka (retour) : le marché de Kuromon et les nigiri d’anthologie
Retour à Osaka pour approcher un autre aspect de la gastronomie : les ingrédients bruts. Le marché Kuromon Ichiba est surnommé la « cuisine d’Osaka ». Vous y trouverez les produits les plus frais : huîtres, oursins, légumes rares, et bien sûr, du poisson à perte de vue.
Ici, ne manquez pas les nigiri sushi préparés minutes à même les échoppes. Un exemple : des kinmedai (daurade royale), dont la douceur se marie parfaitement avec un trait de yuzu. Ou encore l’anago (congre), souvent caramélisé à la sauce tsume.
Un lieu idéal pour comprendre les différences fondamentales entre le sushi « fast-food » et l’art traditionnel du sushi d’Edo-mae.
Jour 6 – Wakayama : entre mer et montagne
Souvent oubliée des circuits classiques, Wakayama mérite une journée pour l’alliance qu’elle propose entre produits de la mer et spécialités de montagne. On y trouve notamment les meilleurs umeshu (liqueurs de prune) du Japon, et des fruits de mer séchés comme les himono.
L’intérêt culinaire majeur : les ramen de Wakayama, qui se distinguent par un bouillon à base de tonkotsu (os de porc) mélangé à une sauce soja. Un subtil équilibre entre puissance et profondeur.
Autre curiosité : les persimmons séchés (kaki), typiques de la région, souvent utilisés dans les desserts ou les infusions.
Jour 7 – Kyoto (retour) : la touche sucrée finale
De retour à Kyoto pour clore l’expérience avec une touche sucrée. Le Kansai est riche en wagashi (pâtisseries traditionnelles) que l’on consomme souvent avec un thé matcha.
Parmi mes douceurs favorites :
- Yatsuhashi – Gâteau de riz gluant parfumé à la cannelle, souvent fourré à la pâte de haricots rouges (anko).
- Kuzu mochi – Gâteau rafraîchissant à base de poudre de kuzu, à tremper dans du kuromitsu (mélasse noire).
- Namagashi – Faits à la main, ces wagashi frais sont de véritables œuvres d’art éphémères, aux formes évocatrices des saisons : érables en automne, sakura au printemps.
Je vous recommande de participer à un atelier de confection de wagashi, souvent proposés dans des maisons de thé traditionnelles. Une manière poétique de mettre la main à la pâte, tout en comprenant l’esthétique du goût propre au Japon.
Un voyage qui s’apprend autant qu’il se déguste
À travers cet itinéraire, j’ai souhaité vous montrer que le Kansai ne se résume pas seulement à des plats iconiques, mais qu’il raconte aussi une histoire : celle d’un savoir-faire transmis, d’une culture du goût, et d’un rapport profond à la saisonnalité et à la nature.
Pour les lecteurs en quête de formation à la cuisine japonaise, noter les différences entre les types de sushi, les techniques de cuisson du tofu, ou la géographie des bouillons, n’est pas anodin. Chaque plat dégusté sur place vous donnera une référence sensorielle, un repère gustatif, qui viendra enrichir votre pratique ou simplement votre oeil de gastronome averti.
Alors, prêt à faire vos bagages… ou plutôt à affûter vos couteaux ? La gastronomie du Kansai vous attend.
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